Journal poétique / www.jouyanna.ch

écriture femme/web

mercredi 17 décembre 2014, par Anna Jouy

Qu’on veuille l’admettre, que l’on en ait conscience, qu’on le nie même ou s’en moque, le fait est que la littérature a de la peine à faire une vraie part à la femme.

Il y a des reproches sous-jacents systématiques d’une parole qui serait trop « douce » pour faire du bon écrit, très succinctement dit. Le verbe ne peut appartenir de toute évidence aux femmes dans un monde où le pouvoir, le commandement, la puissance sont des fiefs masculins. Et ce ne sont pas quelques auteures bien lues par-ci par-là qui effaceront cette inégalité. Les thématiques des femmes ne sont pas dignes de la littérature. On leur porte un intérêt très mineur.

Une porte-parole en toute sincérité des approches de la vie des femmes n’intéresse que très moyennement- voire pas- les hommes en général. Une moitié de la pensée humaine demeure secondaire, alors qu’elle a beaucoup à transmettre à cette société, beaucoup à exprimer en termes de douceur, de respect, de travail et de talents sociaux. Une moitié de la pensée terrestre, qui devrait donc être représentée en tant que telle de façon paritaire ne trouve qu’un écho minimaliste dans les approches et études du langage, de la sensibilité et de l’expression humaine. Le monde universitaire devrait s’interroger.

Mais qu’en est-il de mon blog ? Plusieurs fois déjà j’ai eu l’occasion d’exprimer ici mon approche, mon intérêt, mes démarches personnelles pour pratiquer une littérature numérique et web. J’ai déjà formulé ce que l’usage d’internet à mon avis avait changé ou changeait encore dans ma pratique quotidienne. J’ai dit mon intérêt et une certaine foi en ce « nouveau » moyen.
Le blog m’a amené un certain nombre de lecteurs et lectrices. Il m’a apporté le désir d’un suivi, m’a confrontée à la nécessité de la pratique sérieuse, régulière et réflexive de l’écriture. Mais le blog et internet m’ont mise nombre de fois maintenant face à des situations finalement humiliantes et montrant bien l’acuité du propos explicité plus haut. Nombre de fois et si régulièrement, l’écriture que je pratique est ramenée par des lecteurs soi-disant enthousiastes, à des propositions sexuelles. « Ah ! Que t’écris bien : montre-moi.... fais-moi jouir. »

C’est ça aussi le numérique, ça aussi le développement de la littérature web, ça le retour, l’expansion de la parole où mes mots, mes images, bref mon propos de femme , telle que je suis et vis n’est pas de l’écriture et encore moins de la littérature.

On m’enlève ma parole pour en faire juste un petit manuel de masturbation.

L’usage des mots, l’expression, le retranscrit, l’intimité de la pensée tout cela n’est pas de l’écriture. Tout cela n’est pas de la poésie.
et il y en aura pour songer que je le cherche...

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Messages

  • D’accord
    et
    pas du tout d’accord

    ce n’est pas
    « Une moitié de la pensée humaine (qui) demeure secondaire »
    c’est bien plus
    car l’homme n’est même pas majoritairement
    chez l’homme
    un Homme (tel que ...)

    C’est sur notre lieu de vie (ce monde) dans son entier
    que cet appauvrissement cette rétractation de la pensée
    agit

    Cela ne console pas
    bien sur
    et ne retire rien sur le fond de ce qui est dit là

    mais
    faut-il abandonner le jardin
    à l’emprise mécanique de ce qui
    va plus vite plus haut plus fort ?

    Par chez nous
    (comme en d’autres lieu)
    il est des étendues trop exploitées
    puis délaissées
    où la ronce rapide et agressive s’est développée
    Elle a protégé des bêtes
    (contre elle-même)
    le retour lent et difficile (en nos contrée de peu d’eau)
    du hêtre.

    En d’autres endroits
    il ne restait que la marne nue et stérile
    ON y a planté du pin noir
    (qui tient le sol mais interdit toute autre présence)
    pourtant là aussi des feuillus ce sont installés peu à peu
    et par endroit il prendront le dessus sur l’arbre aux aiguilles acides.

    Ce lieu me fait penser souvent
    à une forêt
    de celles qui survivent ou tentent de s’étendre
    dans des creux possiblement humides
    et où
    aux saisons franches
    comme aux autres
    il fait si beau et si bon
    s’y figer quelques temps.


    (si je cédais à la même désespérance douce et longue
    que je perçois
    une fois de plus j’effacerais un commentaire
    trop pas homme
    et si encombrant qu’il pourrait mériter une gifle ou un silence réprobateur.)

  • vous savez fondamentalement que j’ai besoin de votre regard croisé, de votre voix et dialogue et que ceux dont je parle les ignorent et méprisent. ..
    merci de votre présence dont je peux retirer joies et grand plaisir.

    la littérature reflète l’état du monde ; dans celui-ci il y a encore beaucoup à tracer pour les femmes et je sais que vous êtes entièrement d’accord

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