journal de l’aube 335
dimanche 18 janvier 2015, par
Plonger dans l’eau trouble des souvenirs. Pourtant n’y faire aucune suite. M’y plonger par impulsions de hasard, en m’y enfouissant au petit bonheur la chance, ce temps et puis cet autre, comme à vouloir fouiller une mare, y espérant retrouver sa bague. Ce hasard-là, l’avoir choisi comme outil… Pourtant il ne peut guère amener autre chose que l’échec. Peut-être alors est-ce l’échec que je veux faire revivre, l’échec que je veux voir prendre forme à nouveau et l’échec que je veux voir me justifier de n’être que ce que je suis.
Plongeon d’un rien qui se referme sur le rien.
Par où commencerais-je ? Il n’y a pas de début à un étang. Son aspect est une bouse de lumière, enflaquée dans le terrain. Certains possèdent des terres, d’autres des maisons ou des rues, des châteaux, des cabanes. Moi un étang, de l’eau, qui a commencé à suinter et qui a formé cette sorte de « trou-plein » dans le paysage.
On s’y promène. Parfois il y a une barque, un aventureux sans doute qui rame là-dessus, à ma surface lumineuse. Mais en général, c’est autour qu’on marche, sans même me voir, perdus dans ces conversations intérieures propres aux randonneurs. Ils disent « on va jusqu’à l’étang » et puis quand ils y sont, ils n’éprouvent d’autre besoin que d’en faire invariablement le tour, absorbés sans doute par le retour, par le silence de l’endroit, mais pas par l’étang. Quand il me plait de laisser poindre un nénuphar, en général ce dernier meurt avant que d’être vu. Je suis derrière la barrière de roseaux qui rend les étangs inexistants, bien que largement habités.
Je suis cette parcelle, l’oubli, la fuite d’une eau qui remonte là, de n’avoir aucune destinée de rivière et d’écoulement. Comme une plaie suppure et se gonfle de l’humeur. Je ne suis rien, que de l’eau qui me vient et nourrit ce miroir glauque. Sol tourbeux, affaissements de terre, ruptures de courants souterrains ? J’ignore ce qui m’a créée. Ici, là où je m’appelle, il y a simplement ce « poing » d’eau d’un étang qui ne saurait rien devenir.
Messages
1. journal de l’aube 335, 18 janvier 2015, 08:42, par brigetoun
la mémoire est capricieuse et ne suis aucune chronologie, efface ce qui sur le moment nous a semblé important (sans doute, comment savoir ?)
2. journal de l’aube 335, 18 janvier 2015, 08:49, par Dominique Hasselmann
l’étang est peut-être l’échec du lac...
3. Paysage intérieur , 18 janvier 2015, 10:14, par Ann
Parfois quelqu’un écrit quelque part ce qui résonne avec ce que je suis au présent. Ça me trouble à chaque fois, ça m’émerveille aussi. Je ressens alors le lien qui nous traverse tous, nous relie tous sans que nous en ayons conscience. J’aime cette part d’intime en chacun de nous, qui, débarrassée des apparences "nécessaires" à la vie dans le Réel, nous lie dans le Rêve
1. Paysage intérieur , 18 janvier 2015, 10:40, par Anna Jouy
oui par chance c’est ce qui "autorise" l’écriture, cette parole commune portée par un autre...