Journal poétique / www.jouyanna.ch

dire

mardi 20 janvier 2015, par Anna Jouy

les mots sont puissants. ils créent. des vies, des histoires, des découvertes, des êtres entiers, sortis de quelques mots, inattendus, d’amour, de révélation, d’élévation. ces contes qu’on a écoutés, ces langues qu’on a apprises, ces poèmes qu’on a absorbés, cette parole qui a circulé et uni.
les mots sont puissants. ils détruisent aussi. de quelques mots parfois des êtres brisés, des amours finies, des âmes errantes, des empêchements insolubles de vivre.
très vite on leur reconnait cette force, on apprend qu’il faut en user avec modération, qu’il faut garder sous contrôle ses paroles. que notre propre liberté (de penser) dépend de notre capacité de retenir notre parole.- je ne vais pas chez mon voisin pour lui dire sale con même si je le pense-.

cette parole vociférée de Hitler qu a ensemencé tant de violences dans le crâne de millions d’hommes et tant de morts ensuite.
cette parole de Martin Luther King, celle de Gandhi qui ont délivré de l’oppression.

la parole est puissante, elle est faite de formules, de miracles, d’exaucements. il faut la manier avec précaution. il faut peser son dire et ses conséquences. savoir en quoi elle est nécessaire , en quoi elle fait grandir, en quoi elle sème la destruction.
que ce soit à grande ou à petite échelle, la parole si elle est un droit ne peut se pratiquer qu’en sachant qu’elle n’est jamais gratuite.

l’expression, si elle sert à quelque chose, est en effet un droit. si elle sert uniquement à dire j’en fais ce que je veux, ma parole m’appartient, c’est faire fi de toute éducation, de toute vie en société, de fraternité simplement.

je regrette que des gens dont le métier est d’écrire ou de parler puissent se contenter de revendiquer un droit de tout dire. tout peut être pensé, tout pourtant ne doit se dire qu’en en sachant le prix. et surtout que cela en vaille la peine. je regrette de lire et d’entendre à quel point, alors qu’ils en ont l’usage, certains oublient que la parole a quelque chose de "sacré". hors de toute religion faut-il le préciser.

j’ai envie de le dire. pour d’aucuns ce sera certainement le truc réac à ne surtout pas "exprimer". je suis pourtant bien certaine que pour eux aussi, il y a eu un jour des paroles qui les ont radicalement changés en bien comme en mal. j’ai l’impression parfois d’être dans un monde de farfadets qui jouent avec le feu et les grimoires, ne sachant guère quels démons ils réveillent.

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