Prête-moi un nom, l’usage d’autres voyelles, d’autres dents pour crocheter ma porte. Une clé sans mémoire, sans code, sans puce encore, clandestine ouvreuse des salles obscures- Prête-moi ou mieux…donne-moi !
Refais mon profil, l’œil à bout portant de tirs, l’orbite voilée comme on sème au poquet ses échasses de rizières. Prête-moi des idées, des tendances, une forme mouvante, une ligne, des syllabes, un bruit ne serait-ce… Quelque chose qui ne serait pas ce moi dont le chiffre fait perdurer les incidences du destin. Je n’ai pas l’usage de la fuite, de l’exil, du lointain mais moi aussi je veux m’oublier quelque autre part, dans une carte postale, dans un bar, dans une rue sans nom. Prête- moi l’avatar maçonné de salive et d’amour, un autre je pour vivre et pour écrire… Il me faut un nouveau sceau pour leurrer mes obsessions, un autre masque pour visiter l’encre, une redéfinition du vocable, une nouvelle forme pour tes lèvres. Et je le sais, une autre surgira, pure invention, personnage. Je ne devrai plus rien à personne et encore moins à moi.