Journal poétique / www.jouyanna.ch

istanbul 5

vendredi 10 avril 2015, par Anna Jouy

le vent me prend, très fort. il se plaque contre moi. la bouche cherche le souffle. c’est le grand tsunami de l’air, je suis noyée sous l’oxygène. la pluie s’en mêle, par fracassées et piqûres. le corps se réfugie dans le manteau, sous la laine, sous la dernière couche de tissu, félin frileux. ça va durer tout le jour, le détestable va gâcher la belle image, comme un enfant capricieux.

me réfugie dans le hammam. bains turcs. vapeurs et massage. dans la salle, l’imposante table de marbre blanc et la femme aux cheveux noirs m’attendent. on me guide par petits sons pour accomplir le rituel, me coucher ici , me retourner, me laisser frotter avec force, partout, sentir le corps sous cette rature à la gomme de crin. je fixe le plafond, aussi décoré qu’une coupole de mosquée. deux vasques bleutées, je monte au ciel et je me laisse aller à l’entreprise de purification choisie.

Topkapi est une merveille, à l’âme sans cesse violée par des milliers de touristes. je suis dans cette vague du début du matin et tandis que j’avance pas à pas pour zieuter salles et trésors, je ne peux m’empêcher d’imaginer l’incroyable sens et éloge de la beauté qui ont présidé à l’édification de ces constructions, de ces jardins. un tel art de vivre piétiné allègrement avec nos arrogances de selfies, avec nos laideurs de touristes, avec cet esprit grégaire de ne pas être venu à Istanbul sans avoir vu ça...
la paix ne reviendra jamais dans ce merveilleux palais.

le soir je mangerai sous la tempête, comme un passager de sous-marin dans sa bulle d’observation. le boucan en plus

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