Journal poétique / www.jouyanna.ch

si j’y étais

samedi 15 août 2015, par Anna Jouy

a la mer. Je me sens pourtant à la campagne. Il y a de l’herbe partout. L’existence agitée de la station balnéaire semble très loin, presque ailleurs. M’en suis soustraite, la ville me protège et me retient. La maison est mon élément stable, la bitte d’amarrage à laquelle je me cramponne. C’est mon périmètre de sécurité, le radeau ou le récif, un endroit où je reste à peu près au sec. Je pense que ce fut construit pour le mouvement, l’aération, la fluidité des journées entre bains de soleil, cataplasmes de sels, et les ombres calmantes des arbres. Je marche la plupart du temps pour sentir l’océan donner une orée à la solitude, une bordure à l’impuissance. Si j’entre dans l’eau, je passe la frontière, je commence une nouvelle vie. À la limite des vagues échouées, c’est un autre monde. Je marche, je piétine le tout début de la suite des choses. Il y a ce mouvement, cette souplesse du liquide. Et puis tout aussi bien, m’apercevoir que c’est comme de la tôle, qu’on ne peut pas la perforer vraiment, qu’on y pénètre un peu et que tout le reste, le fond, vous repousse vers le ciel, et l’air et d’autres fluides. La mer est un chemin qui bouge sur lequel je ne peux avoir qu’une bonne attitude : laisser faire et barrer du mieux que je peux. On ne marche pas sur l’eau. Quand je rentre de mes balades, je m’affale sur le canapé. Je ferme tout et j’attends que se solidifient lentement les charrois d’écumes de ces étranges mois. J’agis d’ailleurs comme si, à chaque retour, le silence monastique de cet intérieur consolidait d’un nouveau ciment la volonté de retrait et d’indépendance qui m’a fait revenir ici.

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