Journal poétique / www.jouyanna.ch

l’autre fois

dimanche 24 avril 2016, par Anna Jouy

...Et puis y renoncer peut-être aussi parce qu’elle est elle-même la mort, qu’elle l’est entièrement, la mort fraternelle, qui partout la suit et l’accompagne. La mort qui dort en elle, se lève en elle, la mort qui lui tenaille la cervelle. Et lui construire cette chambre intérieure. Pour l’apprivoiser, elle, cadavre aux joues roses, aux seins trop beaux, au visage tout cousu de blessures. Tenter durement d’aimer ce qu’elle aime, cette mort, de penser ce qu’elle pense songe et vit, cette mort. Construire une place fortifiée où la nourrir de musique, de mots, de rêves surtout. La nourrir de morceaux d’elle-même, de sa chair, de sa viande, de tout ce que ce corps engraisse. Nourrir la fauve panthère en elle, qui attend patiemment que quelque vague train l’écrase et la lui livre bouillie et tartare, dans une journée qui finirait enfin. Elle se couche dans la mort nue, enfile sa vêture le jour. Elle lui écrit et la mort bonne, qui sait bien ce qui manque, qui sait ce qui fait tant besoin, lui répond. Les mots brillent et allument la nuit. La mort éclate et parfois, comme venant de très loin, la fille l’entend qui rit et applaudit...

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