Journal poétique / www.jouyanna.ch

vertical

mardi 15 mai 2018, par Anna Jouy

Il est bon de voyager, ainsi le monde en entrant en vous, vous donne à voir une nouvelle image de votre personnalité. L’espace entre dans votre corps et quand il s’en échappe sous forme de pensées, vous êtes étonné de vous savoir mongol, papoue ou suédois. Vous l’ignoriez mais oui, le voyage vous a nourri de ses formes et vous a appris ce que vous ne sauriez savoir de votre seule compagnie.

Mais le voyage n’est pas donné à tout le monde, ni le lointain, ni l’ailleurs. Vous pouvez, hélas, être le gardien de l’oubliette, du puits, du derrick. Vous êtes un groom d’ascenseur et votre verticalité est soit de nuit noire, soit de soleil blanc, une sorte d’aveuglement des bas-fonds et des très hauts
Vous balbutiez alors,vous bégayez votre être si résumé, si implanté, un nuancier de gris. Vous êtes un piston à coulisse,un agité du monorail : Reste un seul choix :parler de vous.
Comment ne pas s’ennuyer avec soi-même ? Ce coin si fréquenté que l’on croit le savoir tout entier.. Pourtant on se décrit en omettant tant de détails, toutes ces choses disséminées dans le décor mais qui ne sont rien dans la tête.
Certains penseront alors que vous êtes un peu comme eux, que vous êtes leur porte-parole. C’est vrai et puis c’est faux.

Je me confronte en permanence à l’écrivain de l’horizontal. Il ouvre sa gueule, comme un tunnel dans une montagne.Le monde arrive à pleines bielles et là-bas un livre vient au monde. On saura tout, les tickets de voyage, de métro, d’avions, les gens qui l’ont traversé et l’ont labouré. Des milliers de kilomètres, des milliers d’âmes.

Je me demande alors quel sens ont mes jambes, quel but mes pieds, mes mains alors que mon temps est un cylindre troncal qui pompe le vertical en espérant une hypothétique nappe phréatique, de l’or noir, ou un filon de nuages.

C’est un mécanisme éjaculatoire, une manie, une secousse régulière alors que d’écrire. Seules variations, les vitesses : rapide, lente, molle ou nerveuse. Dois-je faire des comparaisons ? Bateau, train, vol plané, parfois transports quelconques.
Quand l’écrivain "transvers" ouvre la bouche autant que les yeux, l’écrivain "pervers" les ferme, envahi de boulets de terre, de souvenirs profonds sous la cendre, étouffé de mazout, de bios intérieurs.

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