l’ennui, ce cher ami, qui vient, qui va, ciel sans accroc, plaine repassée de frais.
l’ennui, la feuille blanche, la toile vide, l’esprit poreux, le jour sans marque, sans repère, son nom. et le temps frôlant l’immensité des horloges..

quand d’un instant au suivant, les faits s’égrènent, se présentent à soi défilé, bouchons, circulation à pas serrés.
quand il faut chercher son air entre deux gestes, entre deux courses ou deux affaires, dès l’aube jusqu’à la pleine nuit.
vivre à fond qu’ils disent.
quand chaque heure est bétonnée, chaque jour asphyxié, chaque congé tassé empilé écrasé, occupé comme pays d’actions, de mouvements incessants....
et quand le temps est un imperméable tissu que rien ne peut détendre.

l’ennui, ce cher ami, qui installe dans la maison, des paysages neutres, des respirations si fluides qu’on y chercherait la moindre odeur, qui ouvre les fenêtres vagabondes à l’éparpillement.
qui émiette les murs.
et puis qui s’en va, trainant savates, laissant derrière lui la brume des semences, l’espace.
tout ce que je ne suis pas, tout ce qui est possible encore, tout un imaginaire en germes, le terrain meuble des pensées fertiles.
je ne suis pas à la bourre. je n’ai pas le cerveau compacté, il se glisse en moi des chemins de lombrics, des cavités fécondes.
ce n’est pas moi qui rentre dans la vie, forcing existentiel. c’est elle qui me pénètre. je m’ennuie.