me souviens à peine.
pourtant moment si énorme de ma vie. quand au bout du fil elle dit.. voilà qu’il est là, le crabe.
toute l’eau de la douche n’a pas suffi à laver cette tâche qui venait de me mordre, ce bleu qui allait commencer son cheminement interminable partout sur moi dedans dehors et presque sur chaque pensée me venant...

le crabe qui use les cordes d’immense toile par tous les travers. je l’ai senti ronger le temps et m’envahir. il était là et à peine l’eut-elle prononcé que je n’en sus que la fin, son projet de mort. trop de douleur avait déjà entamé son visage..

un jour comme celui-ci peut-être.

il faisait froid, j’ignorais dans quels bras absorber de la vie, en qui boire de l’oubli...j’avais gravi le plus haut du chemin. en- dessous de moi une mer de brouillard, en-dessus une étoffe froide..
maintenant je me rends compte, j’avais 45 ans, je n’étais pas sortie de l’enfance.je pleurais comme une gosse abandonnée.
quoi que j’avais vécu je l’avais fait en fille sage. il fallait en ces temps de violence perdre la mère et perdre pareil l’enfant.
et puis quand ses mots, les derniers qu’elle prononçât et qu’elle m’avait réservés, ses mots de mère veillant encore au grain.."et toi ça va...?" frissonnèrent dans ma paume, je compris qu’il était temps pour moi aussi de quitter le monde.
cadeau de vie par delà la porte des morts.