Journal poétique / www.jouyanna.ch

journal de l’aube 104

samedi 16 novembre 2013, par Anna Jouy

le temps de ma guerre est étroit, une bande gazée de mots qu’on a bombardés dans l’air. un temps compressé, cerclé désormais de murs de plus en plus hauts. le temps s’est arrêté là, dans cet espace où la guerre n’a plus trouvé de couloir à vents, de bras ouverts, plus d’échappatoire. comme un camp d’isolement, l’hostilité dedans, lion d’abord, puis apprivoisée et puis squelettique animal de zoo et bientôt rien qu’une armure vide.
derrière ces murs seul lui demeure prisonnier:mon temps. la guerre elle-même n’est plus que l’ombre d’elle-même, ne saurait plus qui tuer, qui vaincre. juste la catapulte belliqueuse des secondes arrêtée là, asséchée.on a cru enfermer la guerre et ce fut l’incarcération des jours, captifs de tous les précipités irrésolus des champs de bataille.

on ne retient là-bas non pas la souffrance, non pas le conflit,- ce sont des ossements très bien rongés des charniers secs, non ! dans cette geôle compacte, est enchaîné ce moment du passé où quelque chose de moi a mené le combat.

impossibles dissipations de ces heures emplies des relents de bataille. temps suspendu. entre l’ennemi et moi ne reste que ce souvenir monumental, la mort toujours plus haut levée, pyramide creuse.
il y a dans ces luttes qui ne trouvent pas de pacte, pas d’armistice, pas de déclaration de paix, un temps qui s’empile de cellules mortes, comme un naevus mortel qui grossit sur la vie.
et j’ai ainsi quelques morceaux de mon être qui ne peuvent plus vieillir et qui ne me rejoindront plus. arrêtés, en prison dans un espace étroit où ils veillent sur des monuments, vides de Dieu et des hommes.

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